Résumé de la conférence le 23 juin 2025 par M. Omar Benadda.
Introduction : La philosophie islamique, un héritage méconnu M. Benada, sociologue et conférencier, explore la tradition philosophique islamique, souvent ignorée ou mal comprise. Il souligne l’importance de philosopher en islam, malgré les préjugés et les tensions entre raison et foi. L’anecdote fondatrice : Al-Ghazali et la quête du savoir Al-Ghazali, souvent perçu comme antiphilosophe, est en réalité un pont vers la philosophie. Une anecdote marquante : attaqué par des brigands, il préfère sauver son livre (symbole de son savoir) plutôt que ses biens. Cet événement le pousse à repenser la connaissance, qui ne se réduit pas à une accumulation biologique, mais s’inscrit dans le cœur et l’expérience personnelle. Ibn Tufayl et la génération spontanée Benada découvre Ibn Tufayl (XIIᵉ siècle), auteur d’un conte philosophique préfigurant Robinson Crusoé. Ce philosophe décrit la naissance d’un homme par génération spontanée, adopté par une gazelle. À travers la dissection de sa mère adoptive, le héros cherche le secret de la vie, illustrant une quête philosophique et spirituelle. La philosophie en islam : entre héritage grec et adaptation La philosophie entre dans le monde musulman après la chute des Omeyyades, grâce au calife abbasside Al-Ma’mun, qui rêve d’Aristote. Ce dernier lui indique la voie : raison, révélation et vie dans l’au-delà. Al-Kindi, premier philosophe musulman, traduit les textes grecs et les présente comme hikma (sagesse), un concept coranique, pour les rendre acceptables. Le conflit entre théologiens et philosophes Les théologiens musulmans rejettent d’abord la philosophie, jugée païenne. Al-Kindi, puis Averroès, défendent sa place en islam. Averroès, dans son Traité décisif, argumente que vérité philosophique et vérité religieuse ne s’opposent pas : il y a une seule vérité, accessible par plusieurs chemins. L’apport original des philosophes musulmans Les philosophes musulmans ne se contentent pas de commenter Aristote. Al-Farabi relie Platon et Aristote ; Avicenne introduit la distinction entre essence et existence, fondement de l’existentialisme. Averroès systématise la citation des sources, influençant la méthode philosophique occidentale. La spiritualité et la philosophie : le cas des soufis Benada évoque la rencontre entre Averroès (rationnel) et Ibn Arabi (soufi), symbolisant la frontière entre philosophie et soufisme. Les soufis, comme Ibn Arabi, prônent une connaissance intuitive (ma’rifa), complémentaire à la raison. La philosophie en islam inclut aussi la purification de l’âme et la contemplation de la nature. La crise actuelle : raison, foi et écologie Benada déplore la perte du lien entre l’homme et la nature, central en islam. Il cite l’émir Abdelkader : sans ce lien, la spiritualité se dessèche. La philosophie islamique, en intégrant raison, foi et écologie, offre une réponse aux crises contemporaines. Conclusion : philosopher, c’est dialoguer et pratiquer Pour Benada, philosopher en islam, c’est exercer sa raison, douter, et surtout pratiquer une éthique au quotidien. Il invite à dépasser les clivages (foi/raison, islam/Occident) pour retrouver une humanité commune, en harmonie avec le cosmos.
voir la conférence, lien vidéo: https://www.youtube.com/watch?v=sXa7CNdP-IQ